Page:Sand - Malgretout.djvu/220

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

cière ; je fais l’aumône avec l’argent qu’ils me font épargner. Quant à leurs invitations, j’ai su toujours exiger royalement plus d’honneurs et de plaisirs qu’on ne m’en offrait, faisant voir et savoir que je ne me dérangeais pas pour me divertir médiocrement. Loin de passer pour une complaisante, je suis arrivée à une sorte de royauté qui m’enivre quand je m’ennuie, et qui m’ennuie salutairement quand je suis exposée à m’enivrer trop. Le monde n’est que cela en somme, un breuvage capiteux et une médecine. Le remède est à côté du mal. Qui ne sait pas équilibrer son système et son régime est vite dévoré.

Je n’avais rien à objecter au régime et au système de mademoiselle d’Ortosa ; tout cela était si nouveau pour moi, que franchement je n’y comprenais rien. Je m’abstins donc de réflexions, et, cherchant toujours à-pénétrer en elle, je lui demandai d’où venait la mauvaise réputation dont elle s’était vantée, et qu’elle avait voulu avoir.

— Ceci, dit-elle, est un second chapitre dans ma vie, je ne vous ai dit que le premier. Avant de tourner la page, je veux savoir si vous êtes scandalisée.

— Non, lui dis-je. Je ne peux pas déclarer que j’aime et que j’envie votre existence ; mais on ne peut voir que par ses propres yeux, et vous seule pouvez vous juger. Si vous êtes réellement contente