Page:Sand - Malgretout.djvu/278

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— J’ai quelque chose de secret à lui dire, quelque chose qui m’est personnel.

— Vous allez lui raconter les folies d’Abel pour vous ? Prenez garde ! Sarah n’est pas une sans-souci comme moi. Elle ne rit pas de tout cela. Elle n’est amoureuse de personne, mais elle est sentimentale et mélomane. Elle regarde Abel comme une espèce d’archange, et, au lieu de se moquer de lui, elle le plaindra. Elle est capable de vous dire que vous êtes une coquette effrénée, qu’elle ne croit pas à votre vertu, ou qu’elle la trouve plus immorale que le vice, que vous avez grand tort de mettre vos victimes en brochette à votre corsage, attendu qu’on ne les croit victimes que de votre inconstance, nullement de votre chasteté…

— Est-ce l’opinion de votre sœur ou la vôtre que vous m’exprimez avec tant d’éloquence ?

— Ce n’est jusqu’à présent ni l’une ni l’autre. Moi, je vous admire et je vous adore, vous le savez.

— Je le sens jusqu’au fond de l’âme, ma chérie !

— Quant à ma sœur, elle ne vous connaît pas ; mais il faut un peu de précautions avec elle. Moi, je la crains.

— Et vous ne lui ouvrez pas votre cœur ?

— Quel cœur ? Vous savez bien que je n’en ai pas !

— Vous avez ce qui en tient lieu à la plupart des femmes.

— Quoi donc ?