Page:Sand - Malgretout.djvu/336

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présent que je peux reprendre possession absolue. Cet homme-là n’est pas purifié pour s’être observé pendant trois mois ; cela lui a trop été facile pour qu’il s’en fasse un mérite. Un profond dégoût de son ivresse l’a rendu avide et comme épris de tempérance. Il n’est pas devenu digne de vous pour avoir amèrement pleuré le bonheur qu’il ne devait jamais retrouver ailleurs ; mais il est sûr d’une chose, c’est qu’il ne peut vivre que pour vous, et qu’il aime mieux ne pas vivre du tout que de se livrer de nouveau à qui que ce soit et à quoi que ce soit en dehors de vous. J’ai loué aujourd’hui la maisonnette où je vais me fixer à une lieue d’ici. En dix minutes de chemin de fer, je serai à vos pieds quand vous aurez un ordre à me donner. Quand vous ne voudrez pas me voir, je ne sortirai pas de mon petit jardin. Quand votre père sera de retour, s’il veut de la musique, j’en ferai pour lui et pour vous, mais non pour d’autres. J’apprendrai la culture des fleurs. Je vous ferai des bouquets que je sèmerai sous vos pas dans vos promenades, quand vous ne voudrez pas que je vous les apporte. Et je ne m’ennuierai pas ; je m’instruirai, je deviendrai intelligent, je cesserai d’être un illettré ; j’ai commencé déjà auprès de Nouville. Il sait s’exprimer, lui, il sait écrire. Il m’a donné des leçons, il m’a fait travailler. Il m’a démontré la sincérité de la parole écrite comme on démontre la musique. J’ai compris, je m’exerce, je veux être en état de