Page:Sand - Mauprat.djvu/172

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— Oui, j’en ai fait un hier au soir à la fenêtre de la chapelle, répondis-je ; et, s’il est mauvais, cousine, c’est votre faute.

— Dites que c’est la faute de votre éducation, reprit-elle en s’animant.

Et elle n’était jamais plus belle que lorsque sa fierté et sa vivacité naturelles se réveillaient.

— M’est avis que j’ai beaucoup trop d’éducation, en effet, répondis-je, et que, si j’écoutais davantage mon bon sens naturel, vous ne me railleriez pas tant.

— Il me semble, en vérité, que vous faites assaut d’esprit et de métaphores avec Bernard, dit M. de La Marche en pliant son journal d’un air indifférent et en se rapprochant de nous.

— Je l’en tiens quitte, répondis-je, blessé de cette impertinence ; qu’elle garde son esprit pour vos pareils.

Je me levai pour l’affronter, mais il ne parut pas s’en apercevoir ; et, s’adossant à la cheminée avec une incroyable aisance, il dit en se penchant vers Edmée, d’une voix douce et presque affectueuse :

— Qu’a-t-il donc ? comme s’il se fût informé de la santé de son petit chien.

— Que sait-on ? répondit Edmée du même ton.

Puis elle se leva en ajoutant :

— J’ai trop mal à la tête pour rester là. Donnez-moi le bras pour remonter dans ma chambre.

Elle sortit appuyée sur lui ; je restai stupéfait.

J’attendis, résolu à l’insulter dès qu’il serait revenu au salon ; mais l’abbé entra et, peu après, mon oncle Hubert. Ils se mirent à causer de sujets qui m’étaient tout à fait étrangers (et il en était ainsi de presque tous les sujets de conversation). Je ne savais que faire pour me venger ; mais je n’osais me trahir en présence de mon oncle. Je