Page:Sand - Mauprat.djvu/362

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dont le ciel l’avait doué, de ne pas craindre le châtiment d’un meurtre, involontaire, et de ne pas laisser charger un innocent à leur place. Toutes ces démarches furent sans résultat, et les réponses d’aucun des chasseurs ne purent laisser à mon pauvre ami l’espérance de trouver là une révélation du mystère qui nous enveloppait.

Je fus transféré à Bourges, dans l’ancien château des ducs de Berry, qui sert désormais de prison. Ce fut une grande douleur pour moi d’être séparé de mon fidèle sergent. On lui eût permis de me suivre ; mais il craignait d’être arrêté bientôt à la suggestion de mes ennemis (car il persistait à me croire poursuivi par des haines cachées), et de se trouver par là hors d’état de me servir. Il voulait donc ne pas perdre un instant pour continuer ses recherches tant qu’on ne l’appréhenderait pas au corps.

Deux jours après mon installation à Bourges, Marcasse produisit un acte dressé à sa réquisition par deux notaires de la Châtre, par lequel, d’après les dépositions de dix témoins, on constatait qu’un frère mendiant avait rôdé, tous les jours antérieurs à celui de l’assassinat, dans la Varenne, paru sur divers points à des distances très rapprochées, et notamment couché à Notre-Dame-de-Pouligny la veille de l’événement. Marcasse prétendait que ce moine était Jean de Mauprat ; deux femmes déposèrent qu’elles avaient cru le reconnaître, soit pour Jean, soit pour Gaucher de Mauprat, qui lui ressemblait beaucoup. Mais ce Gaucher était mort noyé dans un étang, le lendemain de la prise du donjon, et toute la ville de la Châtre, ayant vu, le jour de l’assassinat d’Edmée, le trappiste conduire, depuis le matin jusqu’au soir, avec le prieur des Carmes, la procession et les offices au pèlerinage de Vaudevant, ces dépositions, loin de m’être favorables, firent le plus mauvais effet et jetèrent de l’odieux sur ma défense. Le trappiste fit victorieusement prouver