Page:Sand - Mauprat.djvu/92

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vous ne savez que faire pour me rendre imbécile. Mais vous ne sortirez pas d’ici sans jurer que votre mariage avec le lieutenant général ou avec tout autre ne se fera pas avant que vous ayez été ma maîtresse.

— Votre maîtresse ? dit-elle. Y pensez-vous ? Ne pouvez-vous du moins, pour adoucir l’insolence, dire votre femme ?

— C’est ce que diraient tous mes oncles à ma place, parce qu’ils ne se soucieraient que de votre dot. Moi, je n’ai envie de rien autre que de votre beauté. Jurez que vous serez à moi d’abord, et, après, vous serez libre, je le jure. Si je me sens trop jaloux pour le souffrir, un homme n’a qu’une parole, je me ferai sauter la cervelle.

— Je jure, dit Edmée, de n’être à personne avant d’être à vous.

— Ce n’est pas cela ; jurez d’être à moi avant d’être à qui que ce soit.

— C’est la même chose, répondit-elle, je le jure.

— Sur l’Évangile ? sur le nom du Christ ? sur le salut de votre âme ? sur le cercueil de votre mère ?

— Sur l’Évangile, sur le nom du Christ, sur le salut de mon âme, sur le cercueil de ma mère !

— C’est bon.

— Un instant, reprit-elle : vous allez jurer que ma promesse et son exécution resteront un secret entre nous, que mon père ne le saura jamais ni personne qui puisse le lui redire ?

— Ni qui que ce soit au monde. Qu’ai-je besoin qu’on le sache, pourvu que cela soit ?

Elle me fit répéter la formule du serment, et nous nous élançâmes dehors, les mains unies en signe de foi mutuelle.

Là, notre fuite devenait périlleuse. Edmée craignait presque autant les assiégeants que les assiégés. Nous eûmes