Page:Sand - Monsieur Sylvestre.djvu/185

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et je tenterais de la faire renoncer à tous ses droits sur sa fille. Si elle y consentait, j’emmènerais ma petite-fille à ma gentilhommière de Magneval, et, là, je la marierais avec un homme assez fier pour repousser les dons de sa belle-mère et assez épris pour rendre sa femme heureuse dans une condition médiocre. Je ne sais pas si vous rencontreriez facilement cet homme-là et si mademoiselle Jeanne serait assez raisonnable pour le préférer aux brillants cavaliers qui l’entourent ; mais, si j’étais M. Sylvestre, je le tenterais, et, si j’échouais, j’aurais été d’accord avec moi-même d’un bout à l’autre de ma vie, ce qui est la seule manière d’être calme malgré tous les chagrins, et de finir en paix après avoir lutté jusqu’à la dernière heure.

— Vous parlez d’or ! s’écria l’ermite, dont les yeux brillaient déjà du feu de l’enthousiasme à l’idée de recommencer, avec une enfant inconnue et peut-être déjà corrompue au fond du cœur, l’effroyable et stérile lutte soutenue contre Irène. Mais, comme il n’est pas fou le moins du monde, il rêva un instant et reprit : — Vous m’avez dit ce que vous feriez, si vous étiez moi. Il faut me dire à présent ce que vous feriez, s’il vous était possible de vous trouver dans ma situation avec votre manière de voir.

— Je ferais la même chose, mais je la ferais autrement. Je me dirais que, selon toute probabilité, je ne persuaderai pas à madame Irène de me laisser marier sa fille à ma guise, non plus qu’à mademoiselle Jeanne de quitter le monde pour aller s’enterrer à Magneval en vue d’épouser un pauvre hère riche de cœur. Bien certain que je tente une chose à peu près inutile et passablement folle, je la tenterais quand même pour