Page:Sand - Monsieur Sylvestre.djvu/229

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charité avec la dot de ma femme, et personne n’aurait rien à dire.

— Mademoiselle Jeanne est plus scrupuleuse, puisqu’elle parait renoncer à son héritage, à moins que ce ne soit une feinte.

— Ce n’est pas une feinte, c’est un coup de tête. Il paraît qu’il y a un petit fief de Magneval en Champagne et une espèce de grand-père en Suisse ou en Italie, qui lui en assurera la propriété tout de suite. Donc, elle n’est pas dans la misère, et peut s’établir médiocrement, mais honnêtement.

— Alors, l’idée du couvent était une petite comédie ?

— Non, c’était le premier mouvement. Oh ! comme vous êtes sévère pour cette charmante fille ! Elle est charmante dans tout cela, je vous jure, très-fière et très-résignée. D’ailleurs, ma cousine Rébecca, qui est un femme de tête, a tout arrangé pour le mieux. Elle se charge de marier Jeanne, elle la prend avec elle ; mes sœurs aussi s’offrent à lui servir de tantes. Moi, naturellement, je deviens son oncle, et je l’engage à passer l’été chez nous avec madame Duport, dont le mari est forcé d’aller en Allemagne pour des affaires. La pauvre Irène, pour couvrir tout cet éclat, fait semblant de courir après son banquier et passe en Angleterre, où elle restera peut-être. Ainsi tout s’arrange pour le mieux, et, si vous alliez devenir amoureux de ma belle pupille, je vous dirais : Pourquoi non, mon cher ? Mille écus de rente en Champagne et une femme ravissante sous la main, ce n’est pas un mariage d’argent, et, dans votre position, ce n’est pas non plus une folie. Nous reparlerons de ça quelque jour, si vous voulez.