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somnie des vieillards, en faisant de profondes réflexions sur les habitudes de l’ablette ou sur les mœurs du goujon ?




VII

DE PHILIPPE À PIERRE


Volvic, 22 février 1864.

Le bonheur n’est pas une pure abstraction, c’est une faculté de l’âme, féconde en résultats certains. Il ne faut pas le chercher ailleurs que dans l’accomplissement du devoir. C’est la seule chose toujours praticable, toujours nécessaire, toujours certaine. Tout le reste est fugitif, l’amour passe, l’amitié délaisse ou trahit, la mort nous enlève les êtres les plus chers. Toutes ces sources de joie sont donc des sources de douleur. Ce qui ne trompe ni n’égare, c’est la conscience, et, quand elle nous rend un bon témoignage, nous sommes aussi heureux que nous pouvons l’être.

Tu vois que je n’ai pas cherché longtemps ma réponse. Elle est courte, car j’ai un malade en grand danger auprès duquel je vais passer la nuit. J’aimerais mieux l’employer à t’écrire, si je cherchais mon plaisir dans l’égoïsme ; mais le devoir m’appelle. Si je sauve mon malade, je serai demain très-heureux ; sinon, j’aurai la consolation d’avoir fait mon possible, et je n’aurai pas le droit de me plaindre. Quand les circonstances déjouent nos efforts, notre cœur