Page:Sand - Monsieur Sylvestre.djvu/69

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coup sûr, ce n’est, pas moi qui aurais eu le droit de le morigéner, et il sera bien assez puni en devinant combien sont complets et graves aujourd’hui les motifs qui me forcent à refuser ses dons.

Ainsi plus de retour, plus de transaction avec le passé, mon cher Philippe ! Mes vaisseaux sont brûlés à jamais, et il faut qu’à moi tout seul je construise une modeste barque dont le pavillon sera du moins sans tache. À présent tu ne me diras plus : « Je suis inquiet du parti que tu prends ; » tu me diras : « Ne regarde plus derrière toi, et marche ! »




XII

DE PHILIPPE À PIERRE


Volvic, 12 mars.

Je le savais, mon cher enfant, et je croyais que tu le savais ; aussi je ne t’en avais jamais parlé. Ton oncle a gagné quelques centaines de mille francs en cautionnant un marchand d’hommes ; il a fait cela sans scrupule, parce que c’est un être sans réflexion et capable de faire le mal social innocemment, en se retranchant toujours sur sa moralité privée. Élevé dans la religion du moi, pourvu qu’il fasse honneur à sa signature et à sa parole, peu lui importe que son argent serve à perdre ou à sauver le genre humain. Voilà pourquoi je t’ai vu avec chagrin quitter les voies saines de la philosophie spiritualiste, que nous suivions ensemble, pour entrer dans celle du matérialisme, qui