Page:Sand - Mont-Reveche.djvu/294

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habits légers et les fortes chaussures du paysan, elle marcha à la conquête de son fiancé avec un héroïsme digne d’une amazone de l’Arioste. Déterminée à faire tête aux loups s’ils osaient l’aborder, elle se demanda pourquoi elle aurait moins de bravoure et de bonheur, pour satisfaire un rêve romanesque, que n’en avaient chaque nuit les femmes et les enfants de la campagne, pour aller voler un fagot ou une brassée d’herbes dans la propriété du voisin. Souriante, animée, adroite, ardente, elle eût semblé belle à Thierray, en dépit de lui-même, s’il l’eût vue ainsi fendre les genêts comme un chevreuil, ou raser comme un lièvre les joncs épineux des clairières.




XXV


En ce moment, Thierray disait à Flavien, qui était tombé à l’improviste à Mont-Revêche sur les dix heures du soir :

— En vérité, mon ami, je ne sais comment te remercier de ta sollicitude. Quoi ! t’arracher à tes plaisirs, refaire ce long voyage, revenir dans ce pays de loups, pour me tirer d’embarras et me faire faire ce mariage ! J’en suis si confus, que tu devrais bien, pour me rassurer, me laisser croire…

— Que je suis mal guéri de ma passion pour madame Olympe ? Crois-le, si bon te semble, cela ne fait pas grand tort à cette honnête femme. Pour moi, je suis convaincu, à présent, et pour cause, que j’étais un sot et qu’elle n’a même pas compris un mot à cette belle passion. Cependant, ne me rappelle pas trop les absurdités que je t’ai écrites, j’en suis honteux, et te prie de les jeter au feu.