Page:Sand - Nanon, 1872.djvu/257

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une grotte qui s’enfonçait sous le _Druiderin, _dolmen moins important que la _Parelle, _mais remarquable encore par son gros champignon posé en équilibre sur de petits supports. Nous avions déblayé cette grotte de manière à nous y cacher au besoin. J’y entrai, et, mettant ma tête dans mes mains, j’éclatai en sanglots. Personne ne pouvait m’entendre, et j’avais tant besoin de pleurer !

Mais ce brave Dumont était inquiet de la tranquillité que je lui avais montrée, il me cherchait, il m’entendit et m’appela :

— Viens, Nanette, me dit-il ; ne reste pas dans cette cave, montons sur le _Druiderin. _La nuit est belle et il vaut mieux regarder les étoiles que le sein de la terre. J’ai des choses sérieuses à te dire et peut-être qu’elles te donneront le courage qu’il te faut.

Je le suivis, et, quand nous fûmes assis sur l’autel des druides :

— Je vois bien, me dit-il, que ce qui t’afflige le plus, c’est qu’il n’ait pas voulu t’avertir et te voir une dernière fois.

— Eh bien, oui, lui dis-je, c’est cela qui me blesse et me fait penser qu’il me regarde comme une enfant sans cœur et sans raison.

— Alors, Nanette, il faut que tu saches tout et que je te parle comme un père à sa fille. Tu sais qu’Émilien t’aime comme si tu étais sa sœur, sa mère et sa fille en même temps. Voilà comment il parle de toi ; mais sais-tu encore une chose ? c’est qu’il t’aime d’amour. Il jure, lui, que tu ne le sais pas.

Je restai interdite et confuse. L’amour !

Jamais Émilien ne m’avait dit ce mot-là, j