Page:Sand - Nanon, 1872.djvu/349

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he à l’âge où elle pourra disposer d’elle-même, peut-être n’attend-elle que ce moment et ma sanction pour…

— Non ! jamais ! reprit Costejoux en se levant : elle ne m’aime pas, — et, moi, je ne l’aime plus ! Son obstination a lassé ma patience, sa froideur a glacé mon âme ! J’en ai souffert, je l’avoue ; j’ai passé une nuit affreuse, mais je me suis raisonné, résumé, repris. Je suis un homme, j’ai eu tort de croire qu’il y avait quelque chose dans la femme. Pardon, Nanette, vous êtes une exception. Je peux dire devant vous ce que je pense des autres.

— Et votre mère ! m’écriai-je.

— Ma mère ! Exception aussi ! Vous êtes deux, et, après cela, je n’en connais pas d’autres. Mais allons la trouver, cette chère mère ; elle pleure Louise, elle ! elle pleure ! c’est un soulagement pour elle. Aidez-moi à la distraire, à la rassurer, car elle s’inquiète de moi avant tout, et moi, une chose me soulage, c’est que Louise ne l’eût pas rendu heureuse, elle ne l’aimait pas, elle n’aime et n’aimera jamais personne.

— Permettez-moi de croire ma sœur moins indigne ! répondit Émilien avec feu. Je pars, je veux partir à l’instant même. Je vous confie Nanette. Je serai de retour demain ; ma sœur ne peut être loin, puisqu’elle est partie hier au soir. Dites-moi quelle route elle a dû suivre.

— C’est inutile ! puisque le sacrifice est accompli…

— Non, il ne l’est pas !

— Émilien, laissez-moi guérir. J’aime mieux ne pas la revoir.

— Vous guérirez si elle est réellement ingrate, car, pour vous comme pour moi, pour nous qui sommes