Page:Sand - Narcisse, 1884.djvu/125

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qui s’est passé entre nous m’a fait sentir que je devais à tout jamais supprimer les entrevues avec Albany, puisque je ne pourrais le voir ouvertement sans scandale, et secrètement sans descendre aux moyens de l’hypocrisie. Qu’eussé-je fait, qu’eussé-je dit, si, au lieu de vous, j’avais été observée par des gens sans délicatesse et sans générosité ? Il m’eût fallu nier, mentir… m’avilir, par conséquent. Non, je ne le reverrai plus ! Cela, je vous le jure, et vous devez compter sur ma parole !

— C’est toujours ça, dit Narcisse. Pour le reste, ma foi, si je savais parler au bon Dieu, je le prierais de vous rendre aveugle pour un temps !…

— Afin que je ne pusse ni lire ni écrire ? Mais ne pourrais-je pas alors vous prier de me lire les lettres d’Albany et vous dicter mes réponses ?

— Faites-le, demoiselle ! Oh ! je sais bien que l’honnêteté de la chose vous permet de tout confier à des amis ! Mais je vous réponds, moi, pourtant, que je jetterais au feu les belles écritures de ce monsieur, et je lui répondrais, de votre part, d’aller à tous les diables !

On se sépara ainsi amicalement et gaiement, sans se promettre de chercher ou de saisir l’occasion de se revoir, et mademoiselle d’Estorade s’éloigna, sans que Narcisse eût su trouver un mot pour lui en témoigner le désir. Il demeura fort triste, et, comme je lui en demandais la cause :