Page:Sand - Pierre qui roule.djvu/111

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

» Eh bien, je vais vous dire, en artiste, en peintre et en physiologiste, — car je suis un peu tout cela, — ce que vous êtes en récitant votre rôle : un Apollon d’estaminet, ni plus ni moins. Le regard étincelant, trop hardi ; le sourire très-franc, trop crispé par des nerfs imprégnés d’alcool ; le corps très-souple et très-fort, adonné à des poses fantasques qui manquent de sens et d’originalité ; la parole nette et sonore, pleine d’inflexions fausses et cherchant de préférence les intonations les moins musicales et les moins naturelles. Vous seriez un détestable comique. Vous iriez toujours au delà. Vous avez, on dirait, l’esprit tendu et agité ; vous arriveriez difficilement à la bonhomie, et vous ne sauriez dire d’une façon naturelle : Eh bien, comment ça va-t-il ? Vous auriez pu jouer le drame romantique ; on n’en fait plus, et le goût va de plus en plus au drame bourgeois. Si on vous faisait des rôles où, malgré l’habit noir, votre personnage aurait des allures énergiques et une certaine excentricité de caractère, vous seriez bon ; mais on trouve une ou deux fois dans sa vie le rôle qui s’approprie exactement au type que l’on peut représenter complètement. Avant d’être