Page:Sand - Pierre qui roule.djvu/147

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alerte, vive comme une fusée sur la scène. À la ville, Anna Leroy était une blonde sentimentale qui lisait des romans et se trouvait toujours aux prises avec quelque passion douloureuse. Elle aimait tantôt Lambesq, tantôt Léon ; tantôt moi. Elle était si sincère et si douce, que je ne feignis jamais d’être épris d’elle. Je la respectai, Léon la dédaigna parce que Lambesq l’avait compromise et humiliée. Elle vivait dans les larmes, en attendant un nouvel amour qui recommençait toujours la série de ses déceptions et de ses plaintes.

Ainsi les rôles d’homme étaient tenus par Bellamare, Moranbois, Lambesq, Léon et moi ; les rôles de femme par Régine, Impéria, Lucinde et Anna. Une habilleuse qui les servait toutes, et qu’on appelait la Picarde, remplissait les rôles muets ou dotés de trois ou quatre paroles. L’homme qui tenait auprès de nous le même office et qui, en dehors du théâtre, était depuis longtemps attaché à Bellamare en qualité de valet de chambre, ne doit pas être passé sous silence. Il portait l’étrange sobriquet de Purpurin, et s’intitulait Purpurino Purpurini, noble homme vénitien. Cette facétie dont j’ignore l’origine, il ne la savait pas lui-même,