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tiques sous les apparences de la religion officielle.

Ce qu’on eût le plus difficilement extirpé de l’âme du paysan, c’est certainement le culte du dieu Terme. Sans métaphore et sans épigramme, le culte de la borne est invinciblement lié aux éternelles préoccupations de l’homme dont la vie se renferme dans d’étroites limites matérielles. Son champ, son pré, sa terre, voilà son monde. C’est par là qu’il se sent affranchi de l’antique servage. C’est sur ce coin du sol qu’il se croit maître, parce qu’il s’y sent libre relativement, et ne relève que de lui-même. Cette pierre qui marque le sillon où commence pour le voisin son empire, c’est un symbole bien plus qu’une barrière, c’est presque un dieu, c’est un objet sacré.

Dans nos campagnes du centre, où les vieux us régnent peut-être plus qu’ailleurs, le respect de la propriété ne va pas tout seul, et les paysans ont recours, les uns contre les autres, à la religion du passé, beaucoup plus qu’au principe de l’équité publique. On ne se gêne pas beaucoup pour reculer tous les ans d’un sillon la limite de son champ sur celui du voisin inattentif. Mais ce qu’on déplace