Page:Sand - Promenades autour d un village - 1866.djvu/56

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pas voyageurs. Ils ne franchissent pas les terres et les mers comme les oiseaux de passage. Ils s’accouplent, pondent et meurent là où ils sont élevés, une première fois à l’état de chenille, une seconde fois à l’état d’insecte parfait. Ceux-ci n’avaient donc pas traversé la France ; ils étaient originaires de ce coin de rochers, où un accident fortuit de configuration et d’insolation leur procure, dans un très-petit espace, le climat nécessaire à leur existence.

Je dis dans un très-petit espace et crois pouvoir le dire, parce que, dans une promenade ultérieure, en suivant, pendant cinq lieues environ, cette même dentelure de la Creuse, nos amateurs ne virent voler ces lépidoptères méridionaux qu’en un certain coude, remarquablement abrité, où la chaleur était véritablement accablante.

Mais que le rayon habité par ces hôtes étrangers ait un ou plusieurs kilomètres d’étendue, le fait de leur existence au centre de la France n’en est pas moins fort curieux. C’est un peu comme si on rencontrait des gazelles ou des antilopes dans la forêt des Ardennes, par la seule raison, je suppose,