Page:Sand - Promenades autour d un village - 1866.djvu/92

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Je ne peux me défendre d’être touché de ce sentiment qui se manifeste avec une austérité antique. J’offrirais en vain de quoi faire bâtir une belle et bonne maison à la place de la masure qui s’écroule ; ce ne serait pas celle où l’on a vécu et où l’on veut mourir. Fussé-je assez riche pour m’obstiner dans ma fantaisie, car je sais bien qu’à prix d’argent on arrive à triompher de tout, je ne me sentirais pas le courage d’insister pour vaincre cette sainte répugnance.

Je constate encore une particularité. Tout le monde, ici, est monsieur ou madame. Chez nous, ces dénominations aristocratiques sont tout à fait inconnues, et si, on appelle le paysan monsieur, il croit qu’on le raille et il vous reprend. Ici, on vous reprend quand vous dites le nom des gens tout court ; et, quand je demande Moreau par le village, on me répond :

— Quel Moreau ? M. Moreau du Pin ?

J’entre dans un bouge misérable, et je demande qui demeure là.

— Monsieur ***.