Page:Sand - Questions d’art et de littérature, 1878.djvu/117

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M. Z. — Non, mon ami ; ou du moins ce sera une accusation portant sur des péchés véniels. D’abord je vous défends de toute participation à cette théorie, dont je veux vous dire en passant le fin mot…

M. A. — Ce n’est pas la peine. Je m’en vais vous le dire moi-même. « Nous nous soucions fort peu de la littérature qui se fabrique dans les classes moyennes, et de ces classes moyennes elles-mêmes, pour lesquelles nous n’avons pas plus de sympathie que nous n’avons de charité pour les classes pauvres. Mais nous sommes une poignée d’hommes de tête qui avons assis notre bien-être et notre réputation sur un certain statu quo social et politique. Or, il ne nous convient pas que les choses se dérangent. Nous avons péroré et déclamé pour le peuple autrefois ; et c’est parce que nous avons fait la cour aux passions du moment, que nous regardons comme impossible qu’on s’intéresse au peuple sans un motif d’ambition ou sans vanité. Nous avons reconnu qu’il n’y avait pas la plus petite chose à gagner avec lui, et nous l’avons lâché, pour être quelque chose à un autre point de vue et à un autre échelon social. Maintenant nous nous trouvons fort bien assis où nous sommes, et toute l’œuvre de notre vie sera d’empêcher que personne se lève, à moins que ce ne soit nous pour monter, et les autres pour descendre. Pour arriver à notre but, comme nous avons du style, et du savoir-faire, et du savoir-dire, Dieu merci ! nous nous ferons en apparence tout ce qu’il faudra être pour ne pas trop blesser ceux d’en bas et pour complaire à ceux d’en haut. Nous dirons aux uns que nous les portons dans notre cœur, que nous les poussons au progrès, que nous ne rêvons jour et nuit que leur émancipation, et que,