Page:Sand - Questions d’art et de littérature, 1878.djvu/162

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minez, vous dis-je, et vous le verrez, même sans être animé par le dépit, mettre toujours le poëte au-dessus du prince et du guerrier. Dans des stances de remerciement à un marquis, il lui dit :

Tous ces grands conquérants dont l’histoire est armée,
Pour qui Bellonne a fait tant d’exploits belliqueux,
Alcide, Achille, Hector, et cent raille comme eux,
Auraient eu d’un bouvier la mesme destinée.
Si la Muse eût laissé leur mémoire avec eux.
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Peu de grands aujourd’hui sont dignes de ton sort :

le bonheur d’être chanté par un poëte ;

Un avare désir, qui les ronge et les mord.
Ne leur délaisse rien, quand leur charogne est morte,
Que de vers animés par les soins de la Mort.

Ce qu’il y a de remarquable, c’est qu’auprès des femmes, oublié ou non, maître Adam reste toujours courtois et tendre. Il n’a que des louanges galantes et des paragons poétiques pour ses douces protectrices les princesses de Gonzague, dont l’une fut reine de Pologne. On voit qu’il les aime, non-seulement d’amitié, mais d’amour, et qu’il leur pardonne leur oubli, comme à des enfants chéris. Il n’a point de morgue avec elles, et ne les menace pas de cette faux sinistre de la mort qu’il fait flamboyer à tout propos sur des fronts plus mâles et plus ombrageux. On sent qu’il aime la jeunesse et la beauté, comme un poëte et comme un père, et qu’il aurait en horreur l’idée de la destruction de ces beaux œuvres de la nature.

Mais je ne vous ai point montré des plus beaux vers