Page:Sand - Questions d’art et de littérature, 1878.djvu/120

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car elle est plus sage, plus sincère et plus démocrate que ne voudraient le faire croire au peuple les scribes qui prétendent la représenter, et dont elle commence à rougir.

M. A. — Vous commencez à vous émouvoir, vous f Croyez-moi, riez de toutes les sottes prétentions, quelque part que vous les rencontriez. Ayez le courage de donner sur les doigts de vos ouvriers-poëtes quand ils le mériteront ; ce sera un service à leur rendre.

M. Z. — Fort bien. Je suis sûr que les gens qui partagent mon sentiment le feront avec toute la sincérité désirable ; car ce serait faire injure à la raison populaire que de ne pas oser lui dire ce qu’on pense. Mais, à vous dire vrai, jusqu’ici je ne vois pas que la nécessité de cette critique se soit bien manifestée. La presse conservatrice a fait plus de bruit et donné plus d’éclat au sujet de la querelle que ne l’avait encore fait la presse progressive. Ne dirait-on pas, à l’entendre, qu’on ne trouvera plus ni tailleurs, ni bottiers pour habiller ces messieurs, parce que tous les ouvriers sont déjà absorbés par les Muses ? Ne dirait-on pas que chaque jour de nouveaux suicides vont épouvanter la société et décimer la classe prolétaire, parce que la Gloire n’aura pas assez de couronnes pour ses exigences ? On ne s’inquiète ni du vin, ni de la débauche, seules distractions que l’on veuille bien permettre à ses douleurs. On ne se demande pas si, tandis que Boyer, âme religieuse, mais faible, succombait sous le poids de la réflexion, les vices que l’ordre social tolère ou encourage ne conduisaient pas chaque jour des centaines d’hommes à un suicide plus lent, plus obscur et plus affreux. On accuse, on raille,