Page:Sand - Questions politiques et sociales.djvu/203

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et, le dirai-je ? malheureusement le pape court le danger de se laisser gagner à l’hérésie du siècle et de devenir philosophe rationaliste, homme d’État, souverain constitutionnel. Pour peu qu’on s’effraye trop, vous verrez qu’à force d’être catholique officiellement, comme on feint de l’entendre aujourd’hui, il frisera l’athéisme. Dieu en préserve son âme honnête et la conscience de l’humanité !

Si le pape peut encore peser dans les destinées du monde, c’est en restant chrétien. Laissons-le être catholique orthodoxe et ne lui demandons pas de porter la main à l’édifice du culte. Ne lui demandons pas non plus d’être un habile souverain, très compétent sur les chemins de fer, les caisses d’épargne et autres bienfaits de la civilisation, qui porteraient atteinte à la poésie et à la grandeur de son rôle. Un pape industriel fermerait tristement la liste des successeurs de saint Pierre. Qu’il ne soit ni voltairien, ni conservateur, ni babouviste, ni malthusien. Qu’il soit chrétien ! et le malaise de nos âmes cessera. Ceux de nous qui ont gardé l’antique croyance deviendront meilleurs et comprendront que le christianisme est l’amour de l’humanité et la destruction de l’esclavage, Ceux qui l’ont perdue se sentiront mieux préparés à l’examen et ne seront pas poussés à la réaction de l’athéisme, par les crimes commis au nom de Dieu envers l’humanité. Et, si les adeptes du culte de la raison voulaient bien s’en donner la peine, ils feraient une distinction bien aisée. C’est que ni Voltaire ni la Révolution n’ont prétendu prêcher la raison individuelle,