Page:Sand - Questions politiques et sociales.djvu/227

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grands instincts, coutumier des grands actes de miséricorde !

Toutes les fois que nous voudrons appliquer la justice selon les lois divines, c’est-à-dire avec une pansée supérieure aux lois humaines du passé, nous verrons que cette justice même nous commande la pitié pour toute vengeance.

Sachons donc pourquoi ils ne sont ni braves ni généreux, ces hommes qui nous méprisaient et nous faisaient la guerre, il y a quelques jours, et que nous n’avons ni châtiés, ni humiliés, ni menacés depuis que nous sommes les plus forts.

Voici, peut-être : ils ne comprennent pas. Oui, c’est tout simple. Ils vivaient seuls ; ils vivaient entre eux, c’est la même chose ; ils ne voyaient pas, ils ne connaissaient pas le peuple. Le peuple ne s’était pas répandu sur la place publique. Il vivait dans les ateliers, et le dimanche on ne se rencontrait point, les riches ayant coutume de se renfermer et de se cacher ce jour-là. Et puis la vie du peuple était toute cachée aussi, toute concentrée dans son cœur, il ne lui était pas permis d’agir, de parler, de respirer, de vivre en commun. Toute réunion sympathique au dehors était surveillée, on dispersée, ou violentée. On ne savait point si le peuple avait les mœurs de la liberté ; on croyait qu’une fois maître du forum, il y sacrifierait des victimes humaines. On avait les visions maladives qui se lovent dans la solitude. Les hommes sont si peu mauvais naturellement, que, quand de mauvaises institutions changent leurs instincts et faussent leurs