Page:Sand - Souvenirs et Idées.djvu/155

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Il m’est resté de ce passé mystérieux une sorte d’inquiétude, de regret, de terreur, et comme une larme toujours prête à couler, mais je ne sais dans quel sein la répandre et je redoute l’illusion qui me jetterait dans les bras d’une autre mère que la mienne.

— Avez-vous donc une mère dans le monde où nous voici ?

— Oui, une mère que j’adore, comment ne l’aurais-je pas ? Je vous ai dit qu’ici je suis née, et qu’ici l’on ne meurt pas jeune. Mais vous ressemblez à ma mère et voilà pourquoi je ne peux pas m’empêcher de vous regarder avec tendresse.

— Ô Dieu ! m’écriai-je, vous avez une mère que vous chérissez, et moi qui vous ai tant pleurée, je ne suis plus rien pour vous !

Elle parut ne pas me comprendre et me regarda avec une inquiète compassion. Nous étions arrivées au terme de notre marche, je m’assis accablée et en proie à une jalousie désolée que je sentais injuste et que je ne pouvais pas vaincre. Comme je la voyais affligée de mon abattement :

— Je me souviens pourtant, lui dis-je, que