Page:Sand - Souvenirs et Idées.djvu/220

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batteries si près de la ville, et par des sorties fréquentes les aurait obligés à augmenter, au lieu de diminuer l’armée qui assiégeait Paris. Prenant ensuite pour base les bataillons de la garde nationale sur lesquels on pouvait compter, formant des cadres composés d’officiers, de sergents et de caporaux pris dans les rangs des gendarmes et de la garde municipale, nous eussions eu deux cent mille hommes qui auraient enlevé le reste.

Faut-il croire que même alors on aurait pu obliger les Prussiens à lever le siège ? Non certainement ! Mais qui sait si, par des attaques répétées, en les mettant dans l’impossibilité de renforcer Frédéric Charles, Werder et Mecklembourg à fur et à mesure de leurs besoins ; ce qu’ils faisaient tout simplement en expédiant à ces derniers, sur une dépêche télégraphique, de Versailles, de Choisy, des trains de chemin de fer bondés de troupes, l’armée de Chanzy, alors entière et nombreuse, et celle de Faidherbe, n’auraient pu à un moment donné remporter un succès qui, doublant les forces de la province, lui eût permis d’arriver sous Paris et le ravitailler d’un côté ? Tout cela, évidemment, n’est que de la stratégie en chambre : mais comment ne pas se leurrer, même d’un vain espoir !

Enfin, ce qui est fait est fait, il n’y a pas à y revenir ! Il n’était que temps de conclure la paix. Quanta moi j’aurais voulu qu’on la signât il y a deux mois, à tout prix !

Je m’explique :

J’ai hâte de voir l’Allemagne en présence d’elle-même, privée de cette force de cohésion que lui a donnée et que lui donne encore, la menace permanente d’une guerre avec la France. On ne me persuadera pas qu’une nation militaire, ambitieuse, rapace, jeune, orgueilleuse et féodale, comme l’est la Prusse, ait pour longtemps sa raison d’être dans l’évolution de la civilisation moderne et des exigences de l’humanité.