Page:Sand - Souvenirs et Idées.djvu/228

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ce que les portes sont ouvertes pour quitter la ville sans déposer leur bulletin, et cinquante mille qui n’ont pu partir, ne vont pas au scrutin parce qu’il faut faire queue et qu’il pleut ! Aussi que voyons-nous ? une liste nombreuse de démagogues et d’intrigants être élue par un huitième des votants inscrits.

Il y a dix noms qui sont néfastes ; et la signification qu’ils comportent, c’est la lutte, non pas tant du simple prolétaire que de l’ouvrier, ou plutôt de celui qu’en langage d’atelier on nomme le « sublime », contre le capitaliste, le patron, le travailleur économe et la société. C’est un chaos politique et moral ; c’est l’ignorance et la présomption imposant des lois ; c’est un bouleversement général au profit d’une minorité d’ambitieux qui à leur tour seront dévorés par d’autres de la même espèce, et tout cela se passe à l’heure même où il faut faire appel à la concorde, et obtenir de la province des concessions qui coûtent à ses traditions, à ses tendances, à ses nécessités, à ses souvenirs !

Aussi je ne fais qu’un vœu : c’est que le jour où les députés se réuniront à Bordeaux, un homme se lève, et modifiant le mot de Sieyès, s’écrie : « Qu’est la Province ? Rien. Que doit-elle être ? Tout ! » et joignant l’exemple au précepte, que la majorité décide qu’à l’avenir la capitale politique de la France ne sera pas Paris, mais Bourges, Tours ou Périgueux !

Est-ce à dire que dans cette liste de radicaux il ne s’en trouve pas pour lesquels je ne voterais volontiers ? Je puis au contraire en citer trois, que j’aurais été chercher jusqu’au fond de Belleville ou de Ménilmontant. Ce sont les délégués de la Société internationale : cette association mystérieuse qui semble vouloir tout détruire. Et si elle réclame quoi que ce soit de juste et réalisable, j’insiste pour qu’on en fasse l’expérience.

Il ne faut pas se le dissimuler, un grand problème