Page:Sand - Souvenirs et Idées.djvu/70

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des fusils et le peuple des provinces n’en a pas. Vous avez l’argent et la terre, et vous pouvez réduire encore le paysan par la crainte de manquer de travail. Vous êtes les créanciers du paysan, car, de toutes parts, il est endetté et il a bien fallu que l’argent qui l’a sauvé depuis quelques années sortît des coffres de la bourgeoisie. Soyez donc généreux pendant que vous avez encore la force, pendant que vous êtes encore les maîtres. N’attendez pas des cataclysmes que nul ne peut prévoir, mais qui consommeraient la ruine du pauvre avec celle du riche.

Faites aimer la République si vous l’aimez vous-mêmes, et pour commencer épargnez le besoin, puisque le besoin est la première corde à toucher dans l’organisation craintive du paysan. Plus tard vous parlerez à son cœur et à son esprit par l’éducation politique. Le paysan a une vive intelligence, il ne lui manque que la culture. Il a de grands instincts. Il devient le modèle du soldat dans les armées et quand le sol est envahi par l’étranger, il le défend avec héroïsme. Il a eu de grands jours, ce pauvre peuple, et il a encore, malgré l’épou-