Page:Sand - Tamaris.djvu/178

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

que pour me réchauffer, et, pour la troisième fois, je rencontrai mon sorcier, qui, au lieu de se diriger vers Turris, prenait un sentier abrupt pour descendre dans la vallée. Comme le passage me paraissait périlleux sur ce flanc encore très-peu incliné du Coudon, je lui demandai s’il le connaissait assez pour s’y risquer au clair de lune, il me répondit d’un ton préoccupé :

— Bah ! bah ! les loups connaissent tous les chemins.

— Vous avez donc la prétention d’être loup ?

Il s’arrêta, et, comme s’il fût sorti d’un rêve :

— Est-ce vous, dit-il, qui étiez là-haut quand j’ai allumé un feu ?

— Oui, c’était moi. Pourquoi ne m’avez-vous point parlé ?

— Je n’osais pas.

— Vous me preniez pour le diable ?

— Non ; mais le diable s’habille comme il veut. Vous ne vous êtes donc pas perdu dans la forêt ?

— Non, le diable m’a servi de guide.

— Le diable !… il n’en faut point plaisanter !

— Non, il faut l’appeler respectueusement, faire du feu sur les montagnes, cueillir des herbes poussées dans certains endroits, car celles qui viennent en plaine, quoique toutes pareilles, n’ont pas la même vertu : il faut en brûler, ramasser les cendres, dire des paroles, faire trois paquets…