Page:Sand - Tamaris.djvu/192

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son prophète ! Tout est pour le mieux, puisque vous êtes tous contents, même la crédule Nama.

— La crédule Nama est enchantée. On s’attendait à une grande émotion de sa part : eh bien, il n’y a eu chez elle qu’un grand sentiment de joie. Cette fille est si calme, et, disons-le à sa louange, si naturellement chaste, qu’elle n’a senti aucune terreur, aucun remords de mélodrame. « Je suis bien heureuse ! a-t-elle dit ; je pourrai l’aimer toujours, et je ne croirai plus à présent qu’il ne peut pas m’aimer. Je le verrai quand il pourra venir, et, quand il ne le pourra pas, je ne serai ni inquiète ni fâchée. Je quitterai la bastide Roque quand il voudra, j’irai où il me dira d’aller, j’épouserai celui qu’il me commandera d’aimer. Il est mon chef et mon maître, et j’en remercie Dieu. » Ils se sont donc revus chez moi et se sont fraternellement embrassés sous nos yeux. Mademoiselle Roque quitte son affreuse maison ; elle va demeurer à Tamaris avec la marquise, qui se charge de son présent et de son avenir.

— Dès lors, répondis-je, je retire mes objections, habitué que je suis à croire que vous ne pouvez pas vous tromper.

Et je parlai d’autre chose.

Je songeais toujours à m’en aller, non plus pour fuir un danger que je regardais comme surmonté, mais pour revoir ma famille, dont j’étais séparé depuis deux ans, et pour entrer dans l’humble carrière