Page:Sand - Tamaris.djvu/84

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ser. Quoi que vous en disiez, vous y avez songé, puisque vous eussiez voulu pouvoir acheter pour elle le sot et aride terrain que j’ai sur les bras.

— Vous n’avez pas daigné le regarder, ce terrain, reprit la Florade en riant. Moi, je l’ai contemplé ce matin, et vous pouvez, je crois, le voir d’ici. Oui, c’est cette bande de terre humide, là-bas, tout en bas ; regardez.

— Qu’est-ce que ça ? des artichauts ?

— Eh ! oui, mon cher. Un champ d’artichauts de cette vigueur-là représente de la terre à cinq pour cent. Vous avez le meilleur lot ; mais ça ne fait pas que je doive épouser une bayadère. Si vos artichauts eussent été des lentisques ou des genêts épineux, si, avec deux ou trois mille francs, j’eusse pu assurer le sort de cette pauvre fille, je me serais payé cette satisfaction-là, afin de ne plus avoir à y penser ; mais endetter toute ma vie pour elle,… en réparation de quoi ? je vous le demande. — Pourtant si vous pensez que ma conscience y soit engagée,… car enfin voilà qu’on sait mes visites et qu’on jase,… je ferai ce que vous conseillerez. Je ne vous consulte pas pour n’agir qu’à ma guise.

— Vous voilà bien, cœur d’or et folle tête ! Non, je ne vous conseille pas cela. Tâchez de décider mademoiselle Roque à quitter cette maison où elle deviendra folle, et à s’en aller vivre ailleurs où elle n’espérera plus vous voir. Décidez-la aussi à vendre