Page:Sand - Theatre complet 3.djvu/148

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

de temps en temps, un cœur oisif ou inquiet. J’appellerais ainsi une affection dont on ne distingue pas le commencement, tant le passage du respect à l’espérance doit être une nuance délicate ; dont on n’entrevoit pas la fin, tant elle doit sembler impossible. Je ne suis pas expert en matière de sentiment, non, je l’avoue, je n’en ai pas cherché si long pour mon usage. Mais il me semble que, si j’aimais un jour, je me dirais ceci : « L’amour vrai ne calcule ni ne marchande. Il subit les rigueurs, il attend la confiance. Il s’expose et se livre sans rien exiger. Il n’a pas de dépit, il ne craint pas le ridicule, il ne cherche pas à se venger ! »

SARAH, attentive.

Que voulez-vous dire ?

GÉRARD s’approche vivement.

Oui ! que dites-vous là ?

FLAMINIO.

Moi ? Rien ! je fais une théorie. Je plaide la cause des amants soumis… ou repentants.

GÉRARD.

C’est une théorie que milady écoute avec intérêt.

BARBARA.

Oh ! je donner raison à lui !

GÉRARD, à Sarah.

Et vous aussi ! Il paraît que vous ne recevez pas toutes les déclarations avec une égale fureur ?

SARAH, passant devant lui.

Elles ne sont pas toutes également directes, apparemment.

GÉRARD, haut.

Certes ! il est des gens sans tact, sans usage ! Mais il en est d’autres (regardant Flaminio) que leur brillante éducation et leur rang dans le monde…

FLAMINIO, tirant sa montre, bas, à Gérard.

Faites attention, cher ami ; nous sommes loin de l’heure…

GÉRARD.

Je le sais très-bien ; mais vous vous permettez les allusions, j’en use aussi. (Haut.) Le caprice des femmes s’attache