Page:Sand - Theatre complet 3.djvu/282

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FAVILLA.

Non, tu te trompes, Marianne ! Il s’installera d’autant qu’il ne sentira pas de contrôle : je le connais ! C’est un pédant d’économie, il ferait du mal ici ! Ce serait de la faiblesse de ma part, et, dans certains cas, la faiblesse est une lâcheté ! Non, non, je ne céderai pas !

MARIANNE, à part, le regardant s’assombrir.

Il faut trouver un autre moyen. (Elle s’assied près de lui, en lui prenant les deux mains et le tirant de sa rêverie.) Écoute, Favilla, écoute-moi bien ; crois-tu que je t’aime ?

FAVILLA.

Toi ?… Eh bien, que croirais-je donc, si je doutais de ça ?

MARIANNE.

Te l’ai-je bien prouvé ? t’ai-je jamais demandé un sacrifice difficile, douloureux, en vue de moi seule ?

FAVILLA.

Jamais ! et quand tu me l’aurais demandé !

MARIANNE.

Tu ne me l’aurais pas refusé ?

FAVILLA.

Non, certes ; comment aurais-je pu trouver difficile ou douloureux de te complaire ?

MARIANNE.

Eh bien, j’ose te demander, pour la première fois de ma vie, de souffrir quelque chose pour l’amour de moi ; tu aimes cette résidence, tu y es attaché par la reconnaissance, par les souvenirs : moi, je ne l’aime plus, j’y souffre, j’y mourrais ; veux-tu que nous la quittions.

FAVILLA, se levant en lui prenant les deux mains.

Tout de suite ! Pourquoi ne m’as-tu pas dit cela plus tôt ? Tu y mourrais ?… Mon Dieu ! partons !… Mais tu es donc malade ? Tu me cachais… ? Oui, dangereusement, peut-être… Ta figure est tout altérée. Oh ! mon Dieu, qu’est-ce donc que tu as ?

Il l’emmène sur le devant de la scène.