Page:Sand - Theatre complet 3.djvu/283

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MARIANNE.

Rien de grave jusqu’à présent, c’est plutôt un malaise moral.

FAVILLA.

Oui !… En effet, je t’ai trouvée préoccupée dans ces derniers temps ; tu avais l’air de ne pas me comprendre ; tu disais des choses que je n’entendais pas moi-même… Si bien que plusieurs fois je me suis demandé : « Qu’ai-je donc dans l’esprit, ou que peut donc avoir Marianne ? Est-ce elle ou moi… ? » Alors, vois-tu, je le regardais, je t’écoutais comme dans un rêve… et j’avais peur.

MARIANNE.

De quoi ?…

FAVILLA.

Je ne sais pas… C’était de moi que j’avais peur !…

MARIANNE, vivement.

Tu avais tort ! c’est moi qui… Écoute, j’ai eu bien de la fatigue, tu sais, dans ces derniers temps ; les veilles… le chagrin, ton chagrin surtout… les femmes sont nerveuses !… Il s’est fait en moi je ne sais quel trouble, une inquiétude sans but, un effroi sans cause, enfin je ne me reconnais plus !

FAVILLA.

Ah ! un affaiblissement de la mémoire, n’est-ce pas ?

MARIANNE.

Précisément !

FAVILLA.

Des impatiences… des illusions !

MARIANNE, avec douleur, le regardant.

Oui, oui, c’est cela ! c’était comme un désordre dans la pensée.

FAVILLA.

Alors, je comprends ! Que veux-tu ! quand je te voyais ainsi… Oh ! il eût mieux valu que ce fût moi… Pourtant, non ! car, toi, je réponds que tu guériras, je le veux ; et, d’ailleurs, Dieu n’abandonnerait pas le plus pur de ses anges. Au lieu que, si c’était moi… moi, ton soutien, celui de nos en-