Page:Sand - Theatre complet 3.djvu/53

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MADEMOISELLE LEBLANC.

Je le crois bien, ça a le sang épais et la tête lourde d’un paysan !

EDMÉE.

Au contraire ! Il a le sang trop vif ; n’est-ce pas, monsieur Aubert ? C’est de famille, mon père est ainsi. Eh bien, quand il ne serait pas plus studieux, pas plus érudit que lui ?

M. AUBERT.

Ah ! pourvu qu’il eût son cœur généreux, sa bonté inépuisable…

EDMÉE.

Mais… Bernard n’est pas méchant ?

Bernard s’éveille, il a le dos tourné au groupe, il a la tête dans ses mains, il écoute.
MADEMOISELLE LEBLANC.

Que voulez-vous qu’il soit avec cette mine-là ? Regardez-le ! quelle tournure il donne à ses habits ! Et ses cheveux sans poudre, est-ce décent ?

EDMÉE.

Oh ! cela…

MADEMOISELLE LEBLANC.

Mais savez-vous qu’il a manqué tuer Saint-Jean, la première fois qu’on a voulu le coiffer ? « Ôtez-vous de là, a-t-il dit en jurant comme un possédé, ou je vous fais avaler votre boîte à farine ! » Vous riez, mademoiselle ?

EDMÉE.

Sans doute. Je comprends très-bien son horreur pour vos modes absurdes, et je crois qu’il est beaucoup mieux avec sa chevelure naturelle, qui est superbe.

MADEMOISELLE LEBLANC.

Moi, je le trouve affreux avec cette crinière-là.

EDMÉE.

Bah ! tu ne t’y connais pas.