Page:Sand - Theatre complet 4.djvu/178

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Scène VI


JACQUES, seul.

Être seul !… philosopher, disent-ils. Non, vaine recherche, rêverie creuse ! Mais contempler, entendre le ruisseau qui baigne les racines des vieux saules, arches moussues jetées sur le courant argenté ! surprendre le frôlement mystérieux du rouge-gorge dans les festons du lierre, parure splendide des tiges puissantes… nature ! toi seule parles une langue vraie, toi seule renfermes un enseignement divin ! Quelle voix de femme peut devenir aussi harmonieuse que ces feuillages émus par la brise ? Quel livre aussi savant que ces pierres, antiques témoins de la formation du monde ? Quelles prières aussi éloquentes que ces bruits mystérieux de la solitude ? Silence des bois, tu es musique et poëme ! chants et discours des hommes, vous êtes néant et silence !

Il s’étend sur le tertre à gauche et s’assoupit.




Scène VII


JACQUES, CÉLIA.


CÉLIA.

J’ignore où je suis, où je vais : mais les sons d’un luth m’ont attirée. (Voyant Jacques.) Ah !… si j’eusse attendu qu’il vînt me chercher, j’aurais attendu longtemps ! (Le regardant dormir.) Ah ! cœur froissé !… Voilà pourtant le sommeil paisible d’une conscience pure ! — Mais il faut qu’il me dise… Elle lui jette des violettes au visage, Jacques s’éveille.

JACQUES, se soulevant.

Quoi ! c’est vous ? Je vous voyais en songe… ou plutôt je vous entendais…

CÉLIA.

Dire quoi ?