Page:Sand - Theatre complet 4.djvu/182

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CÉLIA.

Vous avouez que jadis cette musique vous empêcha de dormir ?

JACQUES.

Je peux m’en confesser sans honte, puisque j’ai reconnu le néant de mon ivresse. (Se levant et passant à droite.) Jadis… jadis j’aimais les femmes comme les mouches aiment le miel ; mais le feu d’amour dessèche l’entendement, et une âme sincère reçoit la mort quand elle rencontre la perfidie !

CÉLIA.

Alors, votre âme est morte !… Ce doit être une chose bien singulière que l’existence d’un corps sans âme ? Vous êtes content d’être ainsi !

JACQUES.

Non, certes ! Mon existence ne vaut pas un denier, et je la donnerais pour moins encore.

Il va s’asseoir à l’extrême droite.
CÉLIA, appuyée sur une roche, près de Jacques.

J’ai envie de l’acheter ! par curiosité !

JACQUES.

Qu’en feriez-vous ?

CÉLIA.

Que voulez-vous que j’en fasse ? Un jouet, puisque cela n’a aucune valeur. Voyons, combien au juste me vendez-vous ce bout de mauvais fil que la Parque vous dévide et qu’il vous plaît d’appeler une existence ?

JACQUES.

Je vous le céderais pour un couplet de chanson ; mais il faudrait que le couplet fût bon !

CÉLIA.

C’est trop cher ; contentez-vous d’un mot.

JACQUES.

Un seul ? Soit, mais un mot raisonnable.

CÉLIA.

Alors, approchez-vous, car il ne faut pas que les oiseaux