Page:Sand - Theatre complet 4.djvu/248

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

possible à des hommes du monde ! Tu as une ferveur de dévouement qui te fait dépasser le but. Ta volonté est toujours tendue, et tu ne nous permets aucune initiative. Avec toi, on devient une machine qui fonctionne bien, mais qui n’a pas conscience d’elle-même.

MARGUERITE.

C’est possible ; mais que faire, quand tu déclares que tu ne veux rien connaître et rien arranger dans ton existence ?

DES AUBIERS.

Moi ! je dis ça ?

MARGUERITE.

À propos de tout !

DES AUBIERS.

Alors, arrange tout, sans que je m’en aperçoive.

MARGUERITE.

Pour que tu n’aies pas à m’en savoir gré ! J’étais pourtant fière, quand tu me disais : « C’est bien ! » Allons, soit ! j’essayerai de me passer de ma récompense.

DES AUBIERS, vaincu.

Non ! mais, au moins, fais-toi plus gaie, plus tolérante ! Comme tu as abîmé ce pauvre de Luny devant son cousin !

MARGUERITE.

C’est vrai, j’ai été trop loin ! c’est que je pensais que cet homme déshonorerait Cyprien dans la personne de sa maîtresse.

DES AUBIERS, frappé.

Comment ! tu penses sérieusement que de Luny… ?

MARGUERITE.

Je ne suis pas seule à le penser ! tu as vu que M. de Marsac n’essayait pas de me démentir, quand je l’ai dit devant lui.

DES AUBIERS, effrayé, à part.

C’est vrai ! c’est vrai ! Ah ! mon Dieu, il ne nous manquerait plus… Une rivalité entre mon fils et un pareil homme ! après sa dernière affaire à Venise !