Page:Sand - Theatre complet 4.djvu/253

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même ! tout ce que je rêvais, tout ce que je désirais pour vous, je le croyais facile. Vous avez eu confiance en moi, pourtant ! Eh bien, je serai digne de cette confiance-là ! sur moi seul pèsera tout entier le soin de vous faire respecter. Croyez en moi, je le mérite.

ANNA.

Je n’ai jamais douté de votre bon cœur, et de l’intérêt que vous me portez… Mais que pouvez-vous pour moi ? Rien, puisque c’est justement votre intérêt qui me nuit ! À qui pouvez-vous me recommander, me confier, puisque vos parents eux-mêmes… ?

CYPRIEN.

Mes parents… ouvriront les yeux ; ils comprendront combien mon affection pour vous est sérieuse, invincible…

ANNA.

Pourquoi êtes-vous si ému en me disant cela ? Vous m’effrayez !…

CYPRIEN.

Ah ! comprenez-le donc enfin vous-même, que cette affection est tout pour moi ! qu’elle est mon âme, ma vie, mon avenir !

ANNA.

Oh ! mon Dieu ! pourquoi me juriez-vous que c’était de la vraie et bonne amitié ?… Et moi qui vous croyais si raisonnable, si sincère et si pieux !

CYPRIEN.

Anna, je suis tout cela, et je vous aime. Croyez-vous donc que je veuille vous faire outrage, vous perdre ?…

ANNA.

Non, je ne peux pas le croire ; mais j’ai peur de la situation où je suis, je ne la comprends plus. Vous-même, vous n’êtes plus pour moi ce que vous étiez, quand, sous les yeux de notre vieille amie, vous me parliez comme à une sœur. Tenez, nous avons fait un rêve ; vous ne pouvez pas me servir de frère, et moi… nous ne pouvons rien l’un pour l’autre. Adieu ! ne venez plus !