Page:Sand - Theatre de Nohant.djvu/178

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Vous ne vous souciez ni des brunes ni des blondes. Vous n’avez pas la moindre envie de vous marier, et vous vous êtes dépêché de revenir pour n’avoir plus à y songer.

DURAND.

Non ; je suis un homme sincère, et je n’ai fait aucun raisonnement pour me dispenser de prendre un parti. Je suis revenu,… ma foi, parce que mes jambes m’ont ramené ici. Que voulez-vous ! l’habitude, le besoin de travailler, l’impossibilité de rester oisif, d’aller dîner en ville, de faire ma cour… Je n’entends rien à tout cela, moi, que diable ! Je n’ai jamais tenu de propos galants à une femme, je crains d’être l’âne qui contrefait le petit chien ; j’ai senti qu’on allait me trouver parfaitement ridicule, et je me suis dit… Non, je ne me suis rien dit. J’ai pris mon sac de voyage, je me suis mis à marcher, et me voilà arrivé sans trop savoir pourquoi ni comment.

LE VOISIN.

Si vous ne le savez pas, je vais vous le dire, moi ! Vous avez le mariage en horreur, et vous préférez rester vieux garçon. Je devais m’attendre à cela de la part d’un original de votre étoffe. Vous m’avez fait faire un pas de clerc en me priant d’écrire à ma sœur…

DURAND.

Ah ! permettez, je ne vous en ai pas prié du tout ; c’est vous qui me l’avez offert en me persuadant que je devais accepter.

LE VOISIN.

Vous n’avez pas dit non !

DURAND.

Je n’ai pas dit oui !

LE VOISIN.

Et, à présent, vous ne dites ni oui ni non ? Eh bien, ma nièce n’est pas faite pour attendre votre bon plaisir, entendez-vous !… Elle ne manque pas de prétendants, elle ne vous connaît pas, et elle ne vous eût donné la préférence que pour me faire plaisir.