Page:Sand - Theatre de Nohant.djvu/337

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FLORIMOND, faisant le Mezzetin.

Mort de ma vie ! le drôle n’a-t-il pas eu l’insolence de remettre au seigneur Pandolphe, votre père, une lettre que mon maître Octave l’avait chargé de vous donner en secret ?

SYLVIA, jouant.

Quoi ! Pierrot, tu nous as trahis ?

PIERROT, pleurant.

Ce n’est point vrai, mademoiselle, je n’ai point pris de lettre, je n’ai point vu votre papa, je n’ai rien fait de mal, et je n’ai jamais trahi personne. (Montrant Florimond.) C’est ce monsieur-là qui m’en veut, parce que son chien a cassé sa chaîne ; comme si c’était ma faute !

FABIO, jouant.

Quoi ! infâme, tu as lâché le chien ? C’est donc pour me faire dévorer quand j’irai donner la sérénade à ma maîtresse ? (Il lui donne un soufflet de théâtre, bien visible pour le spectateur ; Pierrot, trompé par le bruit, se frotte la joue et sanglote.)

MARIELLE.

Tenez, voyez comme il pleure bien ! Il met de la grâce en toutes choses. La grâce burlesque, la plus rare de toutes ! Allons, Pierrot, console-toi, mon enfant, on ne t’a point frappé. Tu n’en as senti que le vent.

PIERROT.

Pardi ! oui, je dois avoir la tête grosse comme un boisseau.

SYLVIA.

Eh ! non, c’est un jeu. As-tu senti quelque mal ?

PIERROT.

Nenni ; mais, du bruit que cela a fait, il faut qu’il m’ait rompu au moins trois dents.

MARIELLE

Qu’il est naïf !… Écoute, veux-tu gagner cent écus par an pour commencer ? Si l’on est content de toi, on te donnera le double l’an prochain, et, plus tard, tu auras peut-être jusqu’à douze cents livres. Tu seras bien vêtu, bien nourri et traité avec amitié.