Page:Sand - Tour de Percemont.djvu/140

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yeux, quelle bouche, quelles mains ! Je me sentis fou d’amour, et, malgré la présence de la Charliette, qui ne la quitta pas, je sus le lui dire.

» — Voilà ce que je craignais, me dit-elle, vous avez compté sur le retour, et, si je ne vous dis pas oui tout de suite, vous allez me haïr !

» — Non, lui dis-je ; je souffrirai beaucoup, mais je me soumettrai encore un peu.

» — Un peu seulement ? Eh bien ! écoutez, je crois en vous maintenant, et je compte sur vous pour m’aider à fuir ce couvent, où je me meurs, vous le voyez bien ; mais je n’ai pas le désir de me marier encore, et je ne puis agréer qu’un homme qui m’aimera avec le désintéressement le plus absolu. Si vous êtes cet homme-là, ce sera à vous de me le prouver et de me porter secours sans condition aucune.

» Cet arrêt ne m’effraya pas ; c’est bien le diable si on ne sait pas se faire aimer quand on le veut, et qu’on n’est pas plus vilain qu’un autre. Je jurai tout ce qu’elle exigea. Elle me dit qu’elle voulait, au sortir du couvent, se réfugier chez Miette, et m’y voir en secret afin de me mieux connaître ; mais elle savait que Miette serait contraire à tout projet d’union entre nous. Il me fallait donc ne lui en rien laisser pressentir. De son côté, Marie s’assurerait de son consentement à la recevoir.