Page:Sand - Tour de Percemont.djvu/152

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dre un grand service. En galant homme, il nous céda son appartement sans faire la moindre question et sans voir le visage voilé de ma compagne. Je courus louer une chambre pour moi au plus prochain hôtel, et je laissai Marie se reposer.

» Le lendemain matin, je courais pour procurer du linge, des robes, chapeaux, bottines et pardessus à ma pauvre Marie, dénuée de tout. Je n’épargnai pas l’argent, je lui apportai une toilette délicieuse et une autre plus simple qu’elle m’avait demandée, ne voulant pas attirer l’attention sur elle.

» Je ne peux pas vous dire la joie d’enfant qu’elle éprouva à recevoir tous ces cadeaux et à regarder sa belle robe et sa riche lingerie, elle qui depuis des années portait la robe de bure des nonnettes. Je vis le plaisir qu’elle en ressentait, et je courus lui acheter des gants, une ombrelle, une montre, des rubans, que sais-je ! Elle trouva que j’avais du goût, et me promit de me consulter toujours sur sa toilette. Elle était absolument en confiance avec moi et m’appelait son frère, son cher Jacques, son ami. Les plus douces paroles sortaient de ses lèvres, ses yeux me caressaient ; elle me trouvait beau, aimable, brave, spirituel, charmant ; elle m’aimait enfin, et je crus pouvoir m’agenouiller devant elle et réclamer le bonheur de baiser sa main.