Page:Sand - Tour de Percemont.djvu/155

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que c’était à moi, grand serin, de la faire changer de résolution. Croyez bien que j’y ai fait tout mon possible, mais que voulez-vous qu’on persuade à une femme quand on n’a que la parole à son service ? — Pardon, mon oncle, la parole est une belle chose quand on s’en sert comme vous ; moi, j’ai eu beau étudier pour devenir avocat, je parle toujours comme au village et je ne connais pas les subtilités qui persuadent. Une femme est un être naturellement ergoteur qu’on ne prend pas par les oreilles et qui ne cède qu’à un certain magnétisme quand elle ne se tient pas trop loin du fluide ; mais que faire avec une personne qui ne souffre pas la moindre familiarité, et qui a en elle un tel esprit de révolte et de lutte qu’il faudrait devenir une brute, un sauvage pour l’apprivoiser ?

» J’ai dû me soumettre absolument et devenir un Amadis des Gaules pour être souffert à ses côtés. Le pire de l’affaire, c’est qu’à ce jeu-là je suis devenu amoureux comme un écolier, et que la peur de la fâcher a fait de moi un souffre-douleur et un esclave.

» Avec cela, elle est pleine de contrastes et d’inconséquences. On l’a élevée dans le mysticisme, on s’est bien gardé de lui apprendre à raisonner. Toutes ses pensées étant tournées vers le ciel, elle joue avec les choses de la terre comme avec des riens charmants qu’elle laissera