Page:Sand - Tour de Percemont.djvu/182

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le soir même, tout en jouant avec Ninie, je l’ai portée sans l’avertir de rien auprès de sa sœur, cachée sous les saules. La connaissance a été vite faite, grâce aux bateaux de papier ; mais je dois dire que la passion de mademoiselle de Nives pour cette enfant a été comme un aimant irrésistible. Au bout d’un instant, Léonie s’est pendue à son cou et l’a dévorée de caresses. Elle ne voulait plus la quitter. Je n’ai pu la reconduire à sa bonne qu’en promettant de la ramener le lendemain à la fontaine et à Suzette.

» Hier encore j’ai tenu parole. Suzette avait bourré ses poches de papier rose et bleu de ciel. Elle faisait, avec une adresse de religieuse, de charmantes embarcations qui flottaient à ravir ; mais Ninie ne s’amusait pas comme la veille : elle s’était mis dans la tête de ne plus quitter Suzette et de l’amener ici pour en faire sa bonne. J’ai eu de la peine à les séparer ; enfin ce soir, pour la dernière fois, j’ai vu mademoiselle de Nives au donjon, où il était convenu qu’elle irait m’attendre. Je jugeais cette entrevue inutile à ses projets, et c’est à regret que je m’y suis prêté, puisque le mauvais temps m’empêchait d’y conduire Léonie. Je m’y suis rendu avec un peu d’humeur. C’est une personne irritante que mademoiselle de Nives. Elle se jette à votre cou, moralement parlant. Elle a des inflexions de ten-