Page:Sand - Tour de Percemont.djvu/223

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Madame Chantebel n’était pas rentrée ; Miette s’était courageusement mise à l’œuvre pour nous faire dîner. Elle était un cordon bleu, connaissait mes goûts, et était adorée de mes servantes. Je vis avec plaisir que nous dînerions bien, qu’aucun plat ne serait manqué, ma femme n’étant pas là pour exciter les nerfs de sa cuisinière par trop d’ardeur.

Ce qui me fit plus de plaisir encore, ce fut de voir Henri souriant près de Miette et l’aidant avec gaîté ; il avait ôté son habit et s’était drapé d’un tablier blanc. Cela était si contraire à ses goûts et à ses habitudes de tenue sérieuse que je ne pus lui dissimuler ma surprise.

— Que veux-tu ? me dit-il, il y a ici des héroïnes de drame et de roman qui seraient fort embarrassées de nous faire seulement une omelette. Émilie, qui est cependant pour moi la seule et la vraie héroïne du jour et qui ne cherche à fixer l’attention de personne, se consacre à notre service comme si elle n’était bonne qu’à cela. Il est juste que je tâche de lui épargner de la peine, ou tout au moins que je la fasse rire par mes gaucheries.

Et, comme Miette s’éloignait pour veiller à la pâtisserie :

— Vois, me dit-il, comme elle est adroite et alerte ! Avec sa robe de soie et ses fichus garnis, elle ne prend aucune précaution, et pourtant elle