Page:Sand - Tour de Percemont.djvu/230

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madame Chantebel s’attendrit, et quand mademoiselle de Nives, après ce baiser, prit sa main pour la baiser aussi en signe de respect, elle eut des larmes dans les yeux et fut vaincue.

— Ça n’empêche pas, me dit-elle en se dirigeant avec moi vers la cuisine, que Jacques fait là un mariage étonnant et bien au-dessus de sa condition ! Puisque tu t’entends si bien à faire des miracles, m’est avis, monsieur Chantebel, que tu aurais bien pu songer à ton fils avant tout autre. Henri eût été pour cette demoiselle un mari bien autrement convenable et agréable que le gros Jaquet.

— Madame ma femme, répondis-je, écoutez-moi. Laissons la cuisine aller son train, tout y marche à souhait ; causons un peu sous ces noisetiers, comme deux vieux amis qui ne doivent avoir qu’un seul cœur et une seule volonté !

Je racontai à ma femme tout ce qui s’était passé, et j’ajoutai :

— Tu vois donc que mademoiselle de Nives, attendue et espérée à bon droit par Jacques, ne devait pas être la femme d’un autre, à moins que cet autre ne fût un ambitieux sans scrupule.

— Tu as raison, monsieur Chantebel, Je ne dis pas non, seulement je regrette…

— Il n’y a rien à regretter. Henri sera heureux dans le mariage, plus heureux que qui que ce soit au monde !