Page:Sand - Tour de Percemont.djvu/365

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simples devenaient de friands morceaux en sortant de ses mains. Il y avait encore quelques bouteilles d’excellent vin dans le cellier du père Chevreuse ; Marianne n’y avait pas fait de tort. En somme, elle mit à son petit dîner autant de coquetterie qu’elle en avait mis dans sa personne et dans ses manières. Philippe, qui ne croyait pas du tout à son personnage d’hôte inattendu, jugea facilement que tout allait grand train pour lui, et qu’il n’aurait pas de peine à se donner pour emporter d’assaut le cœur et la dot de la demoiselle.

Il était sinon gris, du moins un peu tendre au dessert. Pierre, en voulant le retenir par la critique et la contradiction, ne faisait que l’exciter ; madame André, espérant le rendre ridicule, le taquinait ouvertement. Marianne le provoquait à la confiance et à l’expansion avec une finesse qui pouvait fort bien lui paraître un encouragement, si bien qu’au sortir de table, après mille fusées de galanterie louangeuse, les unes assez bien tournées, les autres d’assez mauvais goût, Philippe s’empara du bras de Marianne, disant qu’il voulait voir les grands bœufs et les gros moutons, vu qu’un paysagiste appréciait le bétail mieux qu’un agriculteur.

— Je n’en crois rien, dit Marianne en retirant son bras ; vous avez la prétention d’apprécier tout mieux que nous, à la campagne comme à la