Page:Sand - Valvèdre.djvu/176

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la feinte. Il a tout oublié ; n’y pensons plus et parlons du bonheur d’être ensemble.

Elle me tendait la main. Je n’eus pas le temps de la presser contre mes lèvres. Ses deux enfants revenaient de la promenade. Ils entraient comme un ouragan dans la maison et dans le salon.

L’aîné était beau comme son père, et lui ressemblait d’une manière frappante. Paolino rappelait Alida, mais en charge ; il était laid. Je me souvins qu’Obernay m’avait parlé d’une préférence marquée de madame de Valvèdre pour Edmond, et involontairement j’épiai les premières caresses qui accueillirent l’un et l’autre. De tendres baisers furent prodigués à l’aîné, et elle me le présenta en me demandant si je le trouvais joli. Elle effleura à peine les joues de l’autre, en ajoutant :

— Quant à celui-ci, il ne l’est pas, je le sais !

Le pauvre enfant se mit à rire, et, serrant la tête de sa mère dans ses bras :

— C’est égal, dit-il, il faut embrasser ton singe !

Elle l’embrassa en le grondant de ses manières brusques. Il lui avait meurtri les joues avec ses baisers, où un peu de malice et de vengeance semblait se mêler à son effusion.

Je ne sais pourquoi cette petite scène me causa une impression pénible. Les enfants se mirent à jouer. Alida me demanda à quoi je pensais en la regardant d’un air si sombre. Et, comme je ne répondais pas, elle ajouta à voix basse :