Page:Sand - Valvèdre.djvu/210

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

m’étais lié à mon insu avec le mari, et, sans lui rien confier des orages de mon amour, je lui fis comprendre que des relations ordinaires protégées par l’hypocrisie des convenances étaient impossibles entre deux caractères entiers et passionnés. Il me fallait posséder l’âme d’Alida dans la solitude, j’étais incapable de ruser avec son mari et son entourage.

— Vous avez grand tort d’être ainsi, répondit Moserwald. C’est un puritanisme qui rendra toutes choses bien difficiles ; mais, si vous êtes cassant et maladroit, ce qu’il y a encore de plus habile, c’est de disparaître. Eh bien, cherchons les moyens. M. de Valvèdre est riche et sa femme n’a rien. Je me suis informé à de bonnes sources, et je sais des choses que vous ignorez probablement ; car vous avez traité d’injurieux mon amour pour elle, et pourtant, par le fait, le vôtre lui sera plus nuisible. Savez-vous qu’on peut l’épouser, cette femme charmante, et que ma fortune me permettait d’y prétendre ?

— L’épouser ! Que dites-vous ? Elle n’est donc pas mariée ?…

— Elle est catholique, Valvèdre est protestant, et ils se sont mariés selon le rite de la confession d’Augsbourg, qui admet le divorce. Bien que M. de Valvèdre soit, à ce qu’on dit, un grand philosophe, il n’a pas voulu faire acte de catholicité, et, bien qu’Alida et sa mère fussent très-orthodoxes, ce mariage était si beau pour une fille sans avoir, que l’on n’insista pas pour le faire ratifier par votre Église et par les lois civiles qui